Je rêve d’être confinée, seule, sans famille, sans aucune obligation, sans personne dont il faut s’occuper, se préoccuper... Juste des livres, un vélo, la nature.
Précurseuse d’un mouvement mondial né il y a peu, je me suis confinée pendant une semaine au mois de février, loin du boulot, de la famille, de la ville. Bien trop court pour arriver à se déconnecter d’un monde qui vous rattrape tout le temps, d’une vie où l’on vous a appris à penser aux autres avant de penser à soi. Difficile d’être égoïste, d’envoyer tout bouler et de faire l’ermite. En tout cas, pas en une semaine et pas dans le formatage qui est le mien.
La petite voix intérieure, toujours là, ma meilleure amie mais aussi ma pire ennemie. Celle qui me rappelle que je peux y arriver, celle qui me rappelle aussi qu’il ne faut quand même pas exagérer : « pas sympa de ne pas répondre aux copines », « si tu n’appelles pas maman elle va chier et tu vas le payer pendant des jours », « appelle les enfants, tu leur manque, les mamans des copains ne partent pas, ils vont grandir névrosés, ils …ils … ils… », « fais un petit effort, pense à celles qui ne peuvent pas se payer le luxe de s’en aller, aller, appelle maman, ce n’est quand même pas grand-chose ».
La distance et l’isolement n’empêchent pas le cerveau de fonctionner et les années de rappels à l’ordre au genre « femme » continuent à faire leur œuvre malgré les lectures, malgré les prises de conscience. Je ne regrette pas d’avoir compris dans quel merdier je m’étais (on m’avait) fourrée : être une femme, avoir un mari, des enfants, un travail exigeant… Oui mais le savoir ne règle pas tout.
Cette petite voix, encore et toujours : « Tes problèmes sont des problèmes de riche ». Oui je sais. « Est-ce qu’une seule femme ira mieux si tu mets le couvercle sur tes émotions, tes aspirations, ta libération ? Par contre, tu iras moins bien, alors arrête de culpabiliser ». Oui je sais ça aussi, merci !
Alors j’avance, avec ce cerveau qui tourne en boucle, mes émotions qui le bousculent. Je sais qui je suis, ce dont j’ai besoin, que j’ai raison et que je suis capable de l’assumer, que j’ai besoin de me libérer, que la pression extérieure est trop forte. Je n’ai jamais eu peur du changement, mon champ des possibles est large et il ne tient à moi de l’étendre encore.
Je sais… mais je sens que tout cela à un coût, qu’il n’est pas facile d’assumer d’être soi, qu’il n’est pas facile de faire comprendre qui on est, de constamment lutter, de faire accepter que l’on ne respecte pas LE modèle, son modèle, celui qu’elle pense être le meilleur pour moi probablement par ce qu’elle se dit qu’il est rassurant, qu’il permet de moins souffrir.
Une illusion, son illusion, celle avec laquelle elle m’a construite, inconsciemment, à petits coups répétés, encore, toujours, hier, aujourd’hui, demain. Ce modèle qui met à distance celles qui ne le respectent pas. Nos attitudes sont le clou de son cercueil, la raison qui fera nos compagnons se détourner de nous, nos enfants être malheureux. Nous portons un lourd fardeau mais nous avons appris à le faire avec le sourire. Mais le sourire n’est qu’apparence …
Je rêve d’être confinée, seule, sans famille, sans aucune obligation, sans personne dont il faut s’occuper, se préoccuper... Juste des livres, un vélo, la nature.
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